Le tramway de Brest 3: Bienvenue à bord
Le tramway de Brest 3: Bienvenue à bord
Articles parus dans Le Télégramme (supplément au numéro du jeudi 21 Juin 2012)
Brest. Le tramway? Une locomotive pour la métropole
Le projet d'un tram à Brest n'est pas une idée tombée du ciel. Il est le fruit d'une réflexion politique entamée il y a plus de 20ans. L'aboutissement de nombreux débats et concertations. Il est le symbole d'une ambition métropolitaine clairement affichée.
Tram sur fer ou sur pneu? D'esten ouest ou du nord ausud? La réflexion était loin d'être close. Mais dès 2001, François Cuillandre avait acté dans son programme de campagne la réorganisation des déplacements urbains en l'articulant autour d'un système de transport en commun en site propre, typetramway.
Sauver un réseau en perte de vitesse
Le processus s'annonçait long etcomplexe. Mais surtout «nécessaire», selon le futur maire qui expliquait alors «faire lechoix de l'actionface à un territoire qui courait à l'asphyxie». À cette époque, Brest était confronté à un réel problème de circulation automobile (+30% du trafic entre1994 et2000 sur les principaux itinéraires d'accès à l'agglomération) et, parallèlement, à une baisse d'attractivité de son réseau de bus (- 8% defréquentation entre1991 et2001, alors que l'évolution des charges demeurait en augmentation constante). Certes. Mais le projet d'un tram àBrest était loin de faire l'unanimité...
383 M€ investis
A-t-on les moyens de financer un tel investissement? N'est-ce pas un peu pharaonique vu la dimension du territoire? Les transports en commun seront-ils améliorés pour le reste de la communauté urbaine? De nombreuses questions se sont posées. Voulant faire de «la concertation une étape constructive de ce projet», la collectivité a alors multiplié les réunions publiques. Et immédiatement posé des jalons: «Le tram sera le poumon d'un réseau entièrement restructuré et coordonné aux autres moyens de transport. Il sera aussi et surtout un outil decohésion et de recomposition urbaine d'une métropole en devenir, une véritable locomotive économique». Un bilan de concertation a été réalisé en avril2007. L'avant-projet a été validé à l'été 2008, l'enquête publique lancée en mars 2009, la première pierre posée en juin2010 et tout s'estenchaîné. Avec quelques grincements de dents. Mais aussi beaucoup d'espoir. Au total, 383 M€ ont été investis.
Retour vers le futur
Et le planning parfaitement respecté. Le tramway sera donc inauguré le 23juin, à 11h, comme annoncé dès 2008 par Alain Masson, adjoint au développement durable. Il s'agira du 17etram mis en circulation en France. Et ce n'est pas le premier à Brest... Pour la petite histoire, en 1898 furent ouvertes deux premières lignes de tramway. Le réseau fut exploité jusqu'au bombardement de la ville, en 1944. En 1947, des trolleybus ont pris le relais jusqu'en 1970, date à laquelle ilsont été détrônés par un parc de bus plus moderne et ne nécessitant, surtout, qu'un chauffeur. Mais l'histoire n'est que perpétuel recommencement. En 1984, l'idée lancée par Georges Lombard (maire de Brest de 1959 à1973) de créer un nouveau tramway à Brest refait surface. Elle est rejetée par la population lors d'un référendum consultatif organisé en 1990. Rejetée, mais pas abandonnée...
Tramway. La deuxième ligne se dessine déjà
21 juin 2012 - 4 réaction(s)
Qui dit une ligne de tramway sur un axe est-ouest, suggère aussi une deuxième ligne sur un axe nord-sud. Letracé de la petite soeur de celle qui est inaugurée samedi devrait être décidé lors des élections municipales de 2014.
Les municipales de 2001 avaient constitué la rampe de lancement dela première ligne du tram. Celles de 2014 devraient jeter les bases decette seconde ligne, dont l'équipe Cuillandre a toujours considéré qu'elle constituerait une conséquence logique de la première. Cela posé, la question du tracé decelle-ci n'est pas encore tranchée, du moins pas officiellement car, sur les deux solutions évoquées, l'une semble tout de même privilégiée. Une certitude: alors que des hypothèses fantaisistes, untemps, avaient évoqué la possibilité quecette ligne parte de la rocade sud et rejoigne ensuite le boulevard Clemenceau par le port de commerce, le point de départ de laseconde ligne sera fixé au niveau de la gare. Le tracé rejoindra ensuite la place Albert-Ier, via le boulevard Clemenceau et l'avenue Foch.
Jusqu'à Bellevue ou jusqu'à Loscoat?
C'est après cette étape que deux hypothèses entrent en concurrence. La première envisage de pousser jusqu'à Bellevue, en longeant lesbâtiments universitaires de l'avenue LeGorgeu. L'autre de faire passer laligne par Kérichen et de pousser jusqu'au secteur de Loscoat, aunord de Lambézellec. Cette seconde hypothèse, pour l'heure, semble tenir la corde. Cequ'admet mezza voce Alain Masson, vice-président de Brest Métropole Océane en charge des grands projets: «Il existe déjà, entre Albert-Ier et Bellevue, un axe de transport en commun en site propre où nous pourrions mettre en place un busway. Nos marges de progression en matière de transport collectif y sont limitées. Le nombre de passagers àramasser sur l'axe qui irait jusqu'àLoscoat serait bien plus élevé, nous affirment nos experts».
200 millions d'euros
Le coût de cette seconde ligne est actuellement évalué à 200millions d'euros, soit environ la moitié decelui de la première. Son tracé serait lui aussi plus court: à peu près 6,8km. Mais cette future seconde ligne prévoit également la création d'un système de tram-train. Brest se situant en bout de ligne, lapartie de réseau ferré s'étendant jusqu'au Relecq-Kerhuon ? voire jusqu'à Landerneau, si accord de la municipalité en question ? pourrait voir circuler de telles rames. Ajoutons que trois prolongements auxdeux lignes sont déjà envisagés. Ils permettraient d'étendre le service dutramway aux communes dePlouzané (via l'embranchement du technopôle), Gouesnou (par Kergaradec) et Guipavas (en empruntant le boulevard Michel-Briant, à partir du Froutven).
Brest. Le tramway inauguré aujourd'hui
23 juin 2012 à 07h25 - 1 réaction(s)
Trois ans de chantier, 14,3 km de rails, 250.000 t de béton, 600 ouvriers mobilisés, 383 M€ investis et une ville totalement métamorphosée. Ce week-end, Brest inaugure sa première ligne de tram. Ce samedi, la fête associera les Brestois et les compagnies professionnelles. [L'évènement à suivre en direct sur le site]
> Notre rubrique consacrée au Tram
> La circulation et le stationnement modifiés : tous les détails
La population avait été consultée à plusieurs reprises avant le lancement officiel du projet. Elle avait ensuite été conviée à choisir la couleur des rames, puis le nom des stations. Elle est aujourd'hui invitée à participer activement à l'inauguration de la ligne.
À la population de créer l'événement
Rendez-vous est donné à tous, ce samedi, à 10 h 45. Pour marquer le top départ des festivités, des sirènes de bateaux et les cloches des 31 églises de BMO (Brest métropole océane) résonneront à l'unisson. Et si les automobilistes veulent se joindre au concert en usant de leur klaxon, ils ne seront pas verbalisés. Rue de Siam, une Diva donnera de la voix en attendant quelques surprises.
Il y aura, certes, des discours officiels, de nombreuses personnalités, dont le ministre Jean-Yves Le Drian. Mais là n'est pas l'essentiel. L'inauguration du tram se veut singulière et plurielle. Singulière parce que créée sur mesure. Plurielle parce que c'est la population, dans toute sa diversité, qui sera amenée à créer l'événement.
Trois jours de gratuité
Réparties sur l'ensemble du tracé, les 19 rames vont s'animer en même temps. Dès le coup d'envoi à 11 h, riverains et curieux pourront alors embarquer comme bon leur semble. Et durant trois jours, pour permettre à tous de profiter de cette mise en service, tout sera gratuit.
L'après-midi, le concept sera tout autant participatif. L'ensemble du réseau se transformera en théâtre. Aux côtés d'habitants volontaires, des compagnies professionnelles d'art de la rue feront leur entrée. Douze groupes partiront, à 14 h 14, des mairies des communes de BMO et des quartiers de Brest et convergeront vers le centre-ville offrant sur leur passage d'étonnants rendez-vous artistiques, en espérant marquer les esprits. Seront ainsi du voyage Les Cubiténistes, Oposito et ses drôles d'animaux mécaniques, Impro.Infini, Ilotopie et ses Gens de couleur, le Samu et les balcons bavards ainsi que deux bagad.
Coup de ballet des Brestois
Cette inauguration sera aussi l'occasion de découvrir ou redécouvrir le territoire. À pied, en bus ou en tram, 32 balades urbaines et insolites seront ainsi proposées avec, à chaque fois, une thématique et un guide prêt à livrer une multitude d'anecdotes.
À 22 h 32, nouveau rendez-vous rue de Siam. Là, c'est une chorégraphie originale d'Herwann Asseh qui sera présentée sur une musique tout aussi originale de Michel Taïeb. Pour cette création unique, le chorégraphe n'a pas fait appel à un corps de ballet de renom mais à tous les Brestois, comme depuis le début de cette aventure. Et il n'est pas trop tard pour entrer dans l'histoire ! Inutile d'avoir des années de danse classique dans ses bagages pour participer. L'envie et une bonne dose de bonne humeur devraient suffire. En famille, en solo, entre amis, tout est permis. Seul impératif : venir vêtu de blanc l'idée étant de faire de cette déambulation tonique un véritable hommage à Brest la blanche.
> La danse du tram en avant-première
- Sarah Morio
Tram. La grande traversée d'Yvon Puill
23 juin 2012 - 1 réaction(s)
Mission accomplie ou presque pour Yvon Puill, directeur de la Sem Tram. À l'heure où les premiers passagers vont embarquer dans le tram de Brest(*), celui qui n'a jamais cessé d'être un «capitaine» regarde avec malice les quais de ce drôle de port d'arrivée.
De son bureau qui surplombe la place de la Liberté, à Brest, Yvon Puill entend la sonnette du tram retentir au loin. Naguère, de son poste de commandement, il voyait les balises des ports du monde entier entourer son navire marchand. Et si tout cela était un peu pareil en fait? Il le croit. «Finalement, je n'ai fait que commander des bateaux», songe-t-il. Livrer un tram ou un supertanker, au fond, ça se ressemble. «Tu as un objectif, des moyens limités et un temps imparti. Et tu dois tenir compte des aléas», appuie-t-il pour appuyer sa métaphore. En réalité, Yvon Puill n'aurait jamais dû quitter la marchande. C'était sa vie rêvée, celle qu'il avait imaginée depuis tout gosse, où il se voyait commandant les éléments, debout sur un rocher, à Cléder. Mais l'homme libre n'a pas toujours pu chérir la mer. «J'étais capitaine chez Louis-Dreyfus. Un jour, le paternalisme s'est éclipsé derrière le capitalisme. Les plans sociaux se sont succédé. Ils ont viré des braves gars qui ne savaient faire que ça». La mort dans l'âme, «mais voulant maîtriser mon destin et c'était tellement choquant de vivre ça», Yvon Puill pose sac à terre.
Le tunnel, «c'est notre guerre des tranchées»
Il deviendra «ingénieur d'essai» chez Spi-Batignolles, «une sorte de bricoleur en chef», minimise-t-il malicieusement. Et il voyagera. Partout, cet homme affable va apprendre et laisser infuser les bonnes expériences. De l'Inde, il garde, par exemple, «qu'on ne va tout de même pas faire la leçon à une civilisation aussi forte et ancienne. Là-bas, c'est l'école de l'humilité». Auprès des Anglais, il a aussi beaucoup appris lors de son expérience du tunnel sous la Manche. «Dans le monde des travaux publics, avoir fait le tunnel, c'est comme avoir fait la guerre des tranchées. Il y avait ceux qui y étaient et puis les autres». Lui a été responsable de la mise en forme et dirigé une équipe binationale. «Les Anglais, ils savent faire la part entre le travail et le reste. En réunion, ils peuvent être des chiens et t'emmener boire un verre au pub après, en te parlant de tout autre chose».
Un tsunami évité
De tout cela, et bien au-delà des vicissitudes de la technique et de l'ingénierie, Yvon Puill n'a retenu qu'une certitude. «Tout est humain. Si tu tiens l'humain, tu tiens l'ensemble». À la barre de la société d'économie mixte depuis le début du projet, l'homme n'a eu de cesse de maintenir le mess des officiers du tram en forme et de voir loin. Et tant pis, si après ses expériences à Caen ou Clermont-Ferrand, il voulait ici, sur ses terres d'enfance, «réaliser le chef-d'oeuvre», à savoir une traversée sans orage ni tempête, et qu'il n'a pas pu. «C'était d'une présomption folle», s'étonne-t-il presque. Il mentionne à mi-mots les bourrasques et tempêtes, évoque en le taisant «un tsunami» qui aurait pu faire couler le bateau tram ou tout au moins «nous mettre un an dans la vue, facile». Mais la barre a tenu bon «car, et je ne le dis pas parce que ces gens-là me payent, les gens sont ici d'une intégrité et d'une fiabilité sans faille». Dans un an, «une fois les papiers finis», le capitaine Puill fermera sa cabine de la place de la Liberté, d'où on entend le ding-dong du tram. Il sait le téléphérique à venir, la possible deuxième ligne et en sera peut-être «s'ils veulent de moi». Il sait aussi qu'au Pays Basque, des projets se trament et que le transport collectif a encore tant à faire à travers le monde. Yvon Puill, en homme libre, saura organiser le convoi, ici ou ailleurs.
* Début des festivités d'inauguration aujourd'hui à 10h45. Elles se prolongeront demain et seront accompagnées de trois jours de gratuité sur toute la ligne.
- Steven Le Roy
Brest. Tramway : près de 100.000 personnes transportées samedi
24 juin 2012 à 18h07 - 4 réaction(s)
Samedi, jour d'inauguration de la première ligne du tramway, à Brest, a connu une forte fréquentation. Selon Keolis, société de transports, à qui l'exploitation du réseau a été confiée, 95.000 personnes l'auraient emprunté.
Ce dimanche, où des balades urbaines sont proposées, la pluie persistante a, en matinée, fait un peu chuter la fréquentation, avant une embellie dans l'après-midi. Les rames étaient encore bien garnies en milieu d'après-midi.
> Toutes les images de l'inauguration du tramway samedi
- Rédaction de Brest
Le Télégramme juin 2022
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